Les textes sélectionnés pour le 30e recueil de poésie « Pour l’instant »
Le jury composé de Jacinthe Bédard, de Stéphane Boucher, d’Alexandre Drolet et de Danny Plourde, tous enseignants au département de Lettres, a délibéré.
Parmi les 25 poèmes reçus cette année pour la sélection locale, voici les trois gagnants qui représenteront le Collège pour cette 30e édition. Les trois finalistes seront dévoilés lors du lancement du recueil qui se tiendra le 13 mai 2022 au Collège Ahuntsic.
Le premier prix est décerné au poème « Palimpseste », de Marie-Ève Turgeon, pour les contrastes entre le vivant et le désuet et pour le travail formel tout en allitérations.
La deuxième place revient au poème « Expiration », de Raphaël Bencheqroun, pour l’éveil du corps, du corps mécanique et pour la mécanique du poème.
Enfin, la troisième place est décernée au poème « Debout dans la cuisine », de Noah Boisjoli-Jebali, pour l’ordinaire du quotidien, dans l’écho subjectif du souvenir au présent – dans la belle finale.
Félicitations à tous les participants.
Remerciements particuliers à Corinne Larochelle, Carl Diotte et Gabriel Landry.
Félicitations à ces étudiants, dont les textes seront publiés dans le 30e recueil de poésie Pour l’instant en mai 2022 :
- Marie-Ève Turgeon
2. Raphaël Bencheqroun
3. Noah Boisjoli-Jebali
Palimpseste
Recroquevillée dans ma couverture de peau,
Seul mon souffle trahit le temps
Le cœur, palimpseste usé,
Rouille dans la ferraille tendre
Cette chute au creux du rien
Dévoile l’œil morne
Le lest devient relique
Portée dans le secret du cuir
Les torts grondent,
Ramènent les marées vétustes
Quand le champ de bataille
Est le seul refuge
S’exile la raison,
Bannissant le repos
Expiration
Je souffle et tu prises mes brises,
électrique.s.
De ton gréement sismique tu as fait de
mon fond un tapis de vague curieuses
dans lesquelles j’ai perdu pied.
Tu m’attrapes et je vole
Tu me plantes dans ton sol et j’oublie que ce sont
les instruments de ton dans qui m’évaporent
Le souvenir du mystère – les autres chaleur plus
libre – me tient par le poil du sexe et m’échappe
paresseusement l’écoute de notre grande voile : la
mèche d’amour sourd de nos fontanelles, prête à
étinceler le feuillage restant,
Alerte pour le crépuscule
Debout dans la cuisine
le soleil blanc s’étend
par les gerçures de la porte
un silence sanguin
où l’on entendrait mes plumes se froisser
et les réverbères de la ruelle ronronner
(il y a un cœur d’oiseau dans mon lit)
quant à moi je ne suis pas grand monde
j’ai les yeux troués et je mange
debout dans la cuisine
des cerises pas lavées
des trombes de fantômes clignotent derrière ma fenêtre
debout dans la cuisine
je regarde le froid
qui découvre les branches
et me surprends à voir
pour une dix-neuvième fois
les premiers flocons
friser le trottoir
arrachés de l’enfance
(la paix de ne pas savoir
mais d’avoir confiance)